PROBLÈME MOTEUR DANS UN CAS DE MALADIE DE BASEDOW


A. PUTTEMAN (Bruxelles)

Madame J., 48 ans, est adressée à notre service d’ophtalmologie après traitement et stabilisation de l’hyperthyroïdie type Basedow,

Elle a subi une thyroidectomie et une décompression orbitaire, après quoi la diplopie dont elle se plaignait s’est aggravée.

La patiente mentionne une diplopie constante dans toutes les directions du regard. La diplopie est verticale, il n’existe pas de torsion subjective.

L’examen met en évidence une ésotropie de 3° avec une hauteur de 10° et une excyclotropie objective de 5° (synoptophore et croix double de Maddox). La motilité montre une nette limitation de l’élévation de l’œil gauche et une hauteur droite qui s’accentue dans le regard vers le haut et dans le regard à gauche.

La patiente présente un torticolis, avec la tête penchée à gauche. Il existe une hypofonction secondaire du muscle droit supérieur gauche due à la restriction mécanique du muscle droit inférieur gauche probablement fibrosé (Figure 1)

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Figure 1

PREMIÈRE INTERVENTION
Le test de duction forcée démontre le caractère restrictif de l’élévation en abduction de l’œil gauche. Après désinsertion du muscle droit inférieur, l’élévation se normalise. Mise en place d’une suture ajustable (Vicryl 6/0) sur le muscle droit inférieur gauche désinséré. L’ajustement se réalise sous anesthésie de contact (tétracaïne). On termine par un champ visuel binoculaire confortable, surtout dans le regard primaire et dans le regard vers le bas pour la lecture. Au covertest, on note à la fin une légère surcorrection.

ÉVOLUTION
Diplopie progressive avec accentuation très nette de la surcorrection. Limitation de l’abaissement dans le champ d’action du muscle droit inférieur reculé.

DEUXIÈME INTERVENTION (après 2 mois)
Sous anesthésie locale de gouttes de tétracaïne, nous avons retrouvé le muscle reculé à 6mm de son insertion primitive.

Il nous était impossible de restaurer une vision binoculaire simple dans toutes les directions du regard aussi longtemps que nous avançons ou reculons le muscle parallèlement à son insertion. Avec la collaboration subjective de la patiente et le covertest alterné, nous avons rétabli un champ visuel binoculaire simple et ce en reculant la partie nasale à 8mm de son insertion et la partie temporale à 2mm. La nouvelle insertion est donc oblique par rapport à l’insertion originale (Figure 2)

Nous avons contrôlé le muscle et avons remarqué que les fibres musculaires n’étalent pas torsadées. Dans ce cas particulier, la partie nasale du muscle droit inférieur est probablement plus fibrosé et est donc responsable de la plus grande partie de la restriction musculaire.

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Figure 2

CONCLUSION
L’intérêt de cette observation est de mettre l’accent sur la nécessité d’opérer sous anesthésie de contact avec la collaboration complète de la patiente (pas de sédatif ni autres médicaments).

Il faut éviter à tout prix la surcorrection post-opératoire qui est recherchée dans la chirurgie horizontale du strabisme "concomitant". Lors de la fibrose du muscle droit inférieur, la surcorrection s’accentue dans le temps en général. Ceci est probablement du soit à une contracture de son antagoniste, le muscle droit supérieur, soit à la normalisation de sa fonction (?)

Nous citons l’article de Dyer (1) qui décrit un cas semblable de fibrose partielle d’un muscle droit interne dans la maladie de Basedow.

BIBLIOGRAPHIE
(1) J.A. DYER : "Ocular muscle surgery". The eye and orbit in thyroid disease. Ed. C.A. Gorman et al. Raven Press, New York, 1984.


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(Dernière mise à jour de cette page le 28/05/2006)